Registres paroissiaux

Baptême

Rappels juridiques sur les registres paroissiaux et de catholicité

L’île de Corse qui, au cours de sa longue Histoire, vit sa possession être disputée entre les différentes puissances de la Méditerranée occidentale, fut soumise aux changements législatifs inhérents à la puissance tutélaire qui l’administrait. Les dispositions qui s’appliquèrent, sur son territoire, en matière d’état civil procédèrent cependant des conceptions qui émergèrent, à partir du XVIe siècle, dans la majeure part de l’Europe occidentale.

 

A- Du temps de la souveraineté génoise :

L’obligation d’inscrire sur des registres les noms des baptisés, des mariés et des défunts résulta de la législation canonique, qui s’appliqua dans l’ensemble des pays sous obédience de la Sainte Eglise catholique, apostolique et romaine.

Doctrinalement, le Concile de Trente de 1545-1563 s’attacha à redéfinir strictement chacun des sacrements administrés aux fidèles. Contrairement à ce qui est trop souvent affirmé, il n’imposa cependant aucune obligation de tenue de registres pour préserver la mémoire desdits sacrements. Tout au plus, par le biais de ses canons 1813 à 1816 relatifs à la réforme du mariage du décret Tametsi formulés à la 24e session du 11 novembre 1563, se contenta-t-il d’édicter l’impératif selon lequel les mariages devaient être précédés d’annonces au cours des messes dans l’église et être contractés devant deux ou trois témoins.

Le Catéchisme du Concile de Trente publié en 1566, quant à lui, prévit, au paragraphe IV de son chapitre XV, que les baptisés ne devaient être tenus sur les fonts que par un seul parrain et une seule marraine.

Il fallut attendre le Rituel romain, promulgué par la bulle Apostolicae sedi émise par le Pape Paul V le 14 juin 1614, pour que fût prévue la tenue, par les curés paroissiaux, de cinq livres distincts se rapportant aux baptisés, aux confirmés, aux mariés, aux états des âmes qui servaient alors de recensements, ainsi qu’aux défunts. Il est regrettable que le Rituel, qui fournissait aux curés rédacteurs des modèles d’actes extrêmement complets et précis pour chacun des cas précités, n’ait été, le plus souvent, que très imparfaitement suivi.

B- Du temps de la souveraineté française d’Ancien Régime :

1. A l’égard de la majorité catholique :

Après son rattachement à la France, en 1768, la Corse se trouva régie, en la matière, par une législation aussi ancienne qu’abondante, qui manifestait l’intérêt que ses monarques portaient à cette question. Modèle par excellence de l’Etat-Nation, dont la construction politique était intimement liée au développement de son administration, le Royaume des Fleurs de Lys comprit très tôt l’importance d’instituer un état civil qui était à même de répertorier chacun de ses sujets.

Dès le Roi François Ier, l’ordonnance de Villers-Cotterêts d’août 1539, rendue célèbre par le remplacement du latin au profit du français dans l’ensemble des actes officiels, prévit, dans ses articles 50 à 56, le renseignement par les prêtres de registres des baptêmes, qui avaient notamment pour but d’attester, si besoin était, de la majorité de chaque sujet, ainsi que de registres de décès, qui permettaient de s’assurer de la date exacte de leur mort.

Afin de prévenir les infanticides, le Roi Henri II fit adopter l’édit de Paris de février 1556, qui imposa, sous peine de mort, à chaque femme de déclarer sa grossesse ou son enfantement.

Le Roi Henri III, par l’ordonnance de Blois de mai 1579, rappela, en son article 181, l’obligation de tenir des registres des baptêmes et des sépultures, auxquels il adjoignit celui des mariages, sacrement pour lequel il indiqua, dans les articles 40 à 44, les prescriptions en matière de publication et de consentement.

Le Roi Louis XIV, constatant les manquements quant à l’application des législations prises par ses devanciers, tenta de résoudre ces problèmes :

L’ordonnance de Saint-Germain-en-Laye d’avril 1667 proclama de nouveau l’obligation de tenue des registres de baptême, mariage et décès qui constituaient des preuves judiciaires (article VII) et, afin de venir à bout de la réticence des curés à verser leurs registres au greffe du tribunal de leur ressort, comme ils en avaient théoriquement le devoir depuis 1539, organisa une exigence de double registre qui permettait une conservation parallèle au greffe et à la cure (articles VIII, XI, XII et XIII). Si l’article IX détaillait les utiles mentions que devaient comporter chaque type d’acte, l’article X disposait que les différents types d’actes devaient être inscrits sur un même registre et signés, pour les baptêmes par les père, parrain et marraine, pour les mariages par les mariés et quatre témoins et pour les sépultures par deux proches parents pouvant témoigner du décès.

L’édit de Fontainebleau d’octobre 1691 créa les greffiers, gardes et conservateurs des registres des mariages, baptêmes et sépultures, auprès desquels ils pouvaient être consultés, concurremment à ceux conservés par les curés.

Une déclaration en date du 16 février 1692 sur l’édit de Versailles de décembre 1691 portant création des greffiers des insinuations ecclésiastiques, obligea à énoncer les dispenses de mariage et publications de bans dans les actes de célébration de mariage.

La déclaration du 16 décembre 1698 sur l’édit de Fontainebleau d’octobre 1685 enjoignit de respecter, lors des mariages, les solennités prescrites par les canons et les précédentes ordonnances (article 7) et de faire baptiser les enfants dans l’église de sa paroisse dans les 24h suivant la naissance (article 8).

Le Roi Louis XV, enfin, lutta contre les négligences de ceux chargés de rédiger et de conserver les registres, lesquels n’obéissaient pas toujours scrupuleusement aux impératifs légaux.

L’édit de Paris d’août 1716 porta suppression des offices des greffiers, gardes et conservateurs.

La déclaration du 09 avril 1736 sur l’ordonnance de Saint-Germain-en-Laye d’avril 1667 réitéra et précisa les obligations en matière de tenue des registres, dont leur caractère double (article I), l’apposition sur les deux des signatures requises (article III), les mentions devant être portées sur l’acte de baptême (article IV), sur l’acte de mariage (article VII) et sur l’acte de sépulture (article X), l’enregistrement des ondoiements (article V) et le versement au greffe (article XVII).

L’arrêt du Conseil du 12 juillet 1746 prescrivit la tenue de registres séparés pour les baptêmes et mariages d’une part et les sépultures d’autre part.

Un décret de 1772, venant confirmer l’édit de Paris de février 1556, imposa la tenue de registres de grossesse.

2. A l’égard de la minorité protestante :

Par l’article 9 de la déclaration du 14 décembre 1563 sur l’édit d’Amboise du 19 mars 1563, Charles IX n’obligea pas les protestants à faire baptiser leurs enfants mais, les rendant libres de leur culte, les enjoignit seulement de faire enregistrer la naissance auprès des greffes des tribunaux.

Sous Louis XIV :

L’arrêt du Conseil du 22 septembre 1664, en son article 9, obligea les ministres réformés à tenir des registres de baptême et mariage, avec obligation d’en fournir un extrait au greffe tous les trois mois.

L’arrêt du Conseil du 15 septembre 1685 étendit l’obligation d’enregistrement auprès des greffes aux mariages.

L’édit de Fontainebleau d’octobre 1685 prescrivit, en son article VII,  l’obligation de faire baptiser par les curés les enfants nés de parents de la religion prétendue réformée.

La déclaration du 11 décembre 1685 sur l’édit précédent prévit une notification des décès des protestants au juge royal, accomplie par les deux plus proches parents du défunt.

Le Roi Louis XVI, quant à lui, émit l’édit de Versailles du 07 novembre 1787 concernant ceux qui ne font pas profession de la religion catholique, qui autorisait les mariages protestants (article II), lesquels devaient faire l’objet de publications (article VIII) par les curés ou officiers de justice (article IX) et être déclarés par ces mêmes-ci (articles XVI à XX). Il prévoyait également une déclaration de naissance, signée du père des témoins et du juge (article XXVI), ainsi qu’une déclaration de décès (article XXVIII).

C- A compter de la période révolutionnaire :

La veille même de la proclamation de la République, le décret du 20 septembre 1792 transféra des autorités religieuses vers les autorités civiles la responsabilité de l’enregistrement de l’état civil. Les registres paroissiaux antérieurs devaient être conservés dans la maison commune pour ceux qui étaient jusqu’alors tenus dans les églises paroissiales (titre VI articles 1 et 2) et aux archives départementales pour ceux qui étaient déposés dans les greffes (titre VI article 4).

Toujours soumis à la juridiction pontificale, les prêtres continuèrent de tenir des registres de catholicité, selon les dispositions prévues par le Rituel romain de 1614. Ces actes, ayant perdu depuis lors leur caractère d’archives publiques, ne relèvent, plus en principe, d’une conservation par les communes et archives départementales, mais par les paroisses et archives diocésaines, même si, comme c’est le cas à Mela, de nombreuses exceptions existent en la matière.

Le Code de droit canonique promulgué le 27 mai 1917 par le Pape Benoit XV confirma l’obligation de tenue des registres de catholicité. Les actes de baptême devaient notamment faire mention des noms du prêtre, des parents, des parrains, du lieu et de la date de collation (canon 777) ; ceux de mariage des noms des conjoints et témoins, ainsi que du lieu et du jour de la célébration (canon 1103) ; et ceux de sépulture du nom et de l’âge du défunt, du nom de ses parents ou de son conjoint, de la date de sa mort, du nom du prêtre qui lui a administré les derniers sacrements, du détail de ces derniers, ainsi que du lieu et de la date de son ensevelissement (canon 1238).

Le Code de droit canonique promulgué le 25 janvier 1983 par le Pape Jean-Paul II réitère les mêmes obligations de consignation sur le registre des baptisés des noms du baptisé, du prêtre, des parents, des parrains voire des témoins, du jour du baptême, ainsi que du lieu et de la date de naissance (canon 877), sur le registre des mariages des noms des mariés, de l’assistant et des témoins, ainsi que du lieu et de la date de célébration (canon 1121) et sur le registre des défunts (canon 1182).

Relevé des registres de la collection du greffe consultables sur le site internet des Archives de Corse

 

Relevé des baptêmes de Mela de 1770 à 1788Relevé des baptêmes de Mela de 1770 à 1788 (20.98 Ko)

Relevé des mariages de Mela de 1770 à 1786Relevé des mariages de Mela de 1770 à 1786 (19.49 Ko)

Relevé des sépultures de Mela de 1772 à 1788Relevé des sépultures de Mela de 1772 à 1788 (17.2 Ko)

 

Relevé des registres de catholicité consultables à la Mairie de Mela

 

Relevé des baptêmes de Mela de 1862 à 1902Relevé des baptêmes de Mela de 1862 à 1902 (30.66 Ko)

Relevé des sépultures de Mela de 1875 à 1943Relevé des sépultures de Mela de 1875 à 1943 (22.47 Ko)

 

Le cas des registres paroissiaux et de catholicité de Mela

Comme dans beaucoup d’autres régions montagnardes relativement enclavées, l’obligation de tenue des registres au sein des différentes paroisses rattachées à l’église piévane de Tallano parait avoir été quelque peu évanescente, au cours de la période génoise. Le compte-rendu rédigé le 22 mai 1686 par le Visiteur subdélégué Giuseppe Pietri, abbé piévan d'Orezza, dans le cadre de la visite apostolique effectuée en Corse par Monseigneur Giovanni Battista Spinola, évêque de Luni et Sarzana, note certes l'existence de registres et le commandement qu'il a délivré d'ouvrir un nouveau livre de l'état des âmes. Néanmoins et comme à Sainte-Lucie, les registres paroissiaux de Mela ne sont conservés qu’à partir de 1770, lorsque l’administration française commença à veiller à l’application des édits royaux. Encore faut-il noter que leur renseignement semble avoir été peu rigoureux. Non seulement le nombre d’actes inscrits est étrangement disproportionné d’une année sur l’autre, ce qui peut laisser craindre certaines lacunes dues à l’abstention d’inscription de plusieurs cérémonies, mais encore le juge royal de la Province de Sartène et Bonifacio ne manqua pas de faire remarquer, à la fin de certaines années, quelques manquements aux prescriptions imposées par les législations royales. Cette inobservation partielle ne présenta cependant pas le caractère pittoresque qui affecta les actes de Levie, durant la période, pour lesquels le juge royal ordonna de cesser à la fois de conférer des titres de noblesse fantaisistes qui n’avaient pas été validés par le Conseil supérieur de la Corse, et de traiter d’ignobles ceux qui ne pouvaient faire valoir de titres.

 

Affectés par les troubles de la période révolutionnaire, les registres paroissiaux, rédigés en italien, ne couvrent que la période 1770-1788.

 

Connaissant une étrangement longue interruption, qui dépassa de loin le retour de l’ordre à partir de Bonaparte qui, entre autres succès, régla la question religieuse par le Concordat de 1802, ce qui laisse davantage supposer leur perte que leur absence complète de tenue sur une période de près de trois quarts de siècle, certains registres de catholicités sont néanmoins conservés aux archives communales et ont fait l’objet, pour les actes consultables, d’une numérisation par ma tante Jeanne-Marie, au cours de quelques étés à compter de 2014.

Le Liber Baptizatorum, ou Livre des Baptêmes, couvre la période 1862-1923 et le Liber Mortuorum celle qui s’étale de 1875 à 1943, tous deux connaissant des lacunes pour certaines années. Ecrits dans un mauvais latin souvent ponctué d’abréviations, ils restent néanmoins parfaitement lisibles pour tout locuteur de langues dérivées de celle de la Rome antique, quelque peu frotté d’Humanités.

Commentaires

  • Maisetti jf
    • 1. Maisetti jf Le 08/07/2015
    Très bien ;sache,cher ami, que mon arrière grand-père Dom Jean Baptiste PERONI a participé à la guerre de Crimmée en 1855
    a été décoré par la Reine Victoria et a obtenu à son retour à Méla ,outre la Mairie, mais sa nomination comme juge cantonal.
    Notre chapelle,au cimetière de Méla a été érigée par ses soins et est dédiée à Saint Jean Baptiste. Merci et sincères
    sentiments. Jean-François MAISETTI
  • BACCI dominique
    • 2. BACCI dominique Le 01/07/2015
    Bonsoir,
    Je suis dominique le petit fils de Marie Dominique SIMONINI.
    je découvre ce site qui m'as été indiqué par Jean -Paul dans le Milesu : alors je tiens à vous féliciter pour tout ce travail minutieux que vous avez réalisé !!

    a bientot ( peut -être ce été à mela)

    dominique

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